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Ou le Paradoxe du changement
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On peut se demander si les voyages perpétuels de Yayi Boni autour du monde -- il est en passe de concurrencer Youri Gagarine -- ne constituent pas une sorte de fuite devant le réel, comme, entre autres choses, le fait de prendre une décision claire au sujet des résultats des audits ; il y entre une sorte de logique du déprimé : le déprimé essaie de fuir l'ordinaire angoissant, le refoule au travers de multiples scénarii de dépaysement et, dès que la réalité revient, dès qu’il se retrouve seul face à lui-même, il prend peur, angoisse... et fuit à nouveau …cercle vicieux…
Et puis complétant cet angle de vue, il y a cette cotonphilie d'Etat qui, sous prétexte de toucher à ce qui est la base de notre économie, permet de déverser méthodiquement des milliards dans cette filière en or. Certes, d'un côté ce sera toujours ça de pris par nos paysans cotonculteurs qui, à l'instar des esclaves d'hier dans les champs du Nouveau Monde ont longtemps sué pour remplir les poches d'une impitoyable engeance d'exploiteurs sans scrupule ; mais d'un autre côté -- et certains journaux ne se privent pas de l'insinuer -- on n'a pas besoin d'être un esprit tout à fait mal intentionné pour penser qu'il peut s'agir là d'une forme codée de gratitude pré ou post-électorale... Comme s’il y eût une espèce de Cotton-belt reliant le succès politique des uns aux affaires juteuses des autres, au-delà et sans préjudice de l’intérêt national : Cotton-club…
Et pour en revenir à la manie du voyage -- pour sûr, les décollages ou atterrissages d'avion ne font pas peur à notre Yayi Gagarine présidentiel. Ne se pourrait-il pas qu’en vertu d'une persistance de la culture sinon des obligations de l’ex-Banquier le but soit de faire d’une pierre deux coups ? Parachever l’œuvre du banquier dans les habits neufs du Président dont la manche ample permet de tendre ès qualité la main aux donateurs réels ou imaginaires. Certes, on ne saurait nier l'urgence du renflouement des caisses de l'Etat lorsqu'on sait sous quel vide absolu le régime précédent les a placées. Mais n'eût-il pas été dans l'élan éthique du changement de commencer d'abord par faire rendre gorge à ceux qui ont laminé les caisses de l'Etat et dont les responsabilités ont été clairement établies par les audits avant de recourir à la manne des donateurs ? Or donc, voici la question tendancieuse : et si cette géopolitique de la mendicité ne s'inscrivait pas dans le seul intérêt national ? Et si elle visait aussi à faire tourner les rouages d’une machine proto-électorale aussi clinquante qu'en mal de liquidité lubrifiante ?
Dans l'intérêt de notre pays, il faut souhaiter qu'il n'y ait là que vague élucubration d’un esprit mal tourné ; car quoi, on serait en plein paradoxe du changement : on veut changer, mais pour changer on en arrive à faire usage des mêmes méthodes que prétend combattre le Changement, donc on ne change pas...
Nkosi sikeleli Bénin !
Par Nicephore AGADA
© Copyright, Blaise APLOGAN, 2006
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