Vérités de mes échos
Cette solitude qui ressemble à la mort.
Et, comme la mort, on n’a pas choisie
Cette solitude imposée par des gens malins et forts
Cette solitude des coups portés au ventre
Qui à force de vous hanter laissent des blessures
A penser si jamais l’espoir de vivre vous habite encore
Cette solitude à l’aune d’une vie truquée
Cette solitude des gens heureux
Cette solitude barbarie
Cette solitude qui n’est pas la vôtre
Et que vous devez porter comme une croix
Vers les dunes du désert de votre solitude
Cette solitude qui arrange les bonnes consciences
A l’ombre du baobab artificiel des droits de l’homme
Cette solitude qui ne dit rien de la solitude
Cette solitude irréelle
Cette solitude que l’étonnement n’étonne pas
Que la révolte ne révolte pas
Cette solitude réservation
A l’hôtel de l’hôte non-désiré
Cette solitude sacrifice
Sur l’autel de l’autre mal aimé
Oui cette étrange solitude remonte à la souche !
1. – Le problème de l’homme en tant qu’espèce c’est qu’il n’a rien à haïr en tant qu’espèce. Car la haine est aussi un phénomène religieux.
2. – On ne devient pas conscient du jour au lendemain. Peut-être même qu’on est né pour être conscient, pour dissiper l’épais nuage d’illusions qui pèse sur notre conscience.
3. – L’homme doit révéler sa condition à la fois dans ses actes et ses choix.
4. – Les gens sont partis de la pratique historique de la barbarie pour arriver à une théorie de la justice, de l’égalité et de la liberté. Théorie encore éminemment frauduleuse et illusoire mais qui a le mérite d’exister, surtout lorsque l’on considère qu’il y a d’autres cieux sous lesquels la barbarie règne sans masque et avec arrogance. Mais à la vérité, ce que réclament les aliénés de par le monde, ce n’est point l’autosatisfaction auto-érotique de la sophistication de la barbarie, encore moins les tonitruantes proclamations d’égalité, de liberté ou de justice, proclamations théâtrales non suivies d’effet. De par le monde, les aliénés réclament en chœur le règne véritable et la pratique véridique d’une justice sans exclusive, d’une égalité totale, et d’une liberté pour tous !
5. – Mettons que les Etats-Unis soient un pays de liberté. Mais alors, dans cette hypothèse, que signifie cette liberté pour la grande majorité des Noirs ? Il est vrai qu’un pays peut être un pays de liberté sans que ses vers de terre soient libres ; dans ce cas, est-ce que les Noirs des Etats-Unis comptent pour des vers ?
6. – J’ai une sereine impression que je n’existe pas, que je ne suis là que pour le constater. Et c’est déjà une faveur.
7. – Les gens ont inventé l’HOMME pour mieux le tuer.
8. – Notre tragédie, à nous autres Nègres en France, c’est qu’on n’est pas assez hommes pour être aimés dans un pays qui hurle à longueur de temps ses valeurs humaines au ciel des vérités universelles, et pas assez animaux pour être dorlotés par les 50 millions d’amis des bêtes qui aboient leur humanité à la face du monde. En somme notre tragédie est dans cette ontologie de l’entre-deux, sanctionnée par les lois discrètes d’une zoologie entre chiens et loups.
9. – En 200 ans, ce qui a vraiment changé dans le monde, c’est que les gens sont passés de la proclamation arrogante de leur supériorité raciale à son masquage frauduleux. Mais la réalité de l’exploitation qui découle d’un tel changement de stratégie, d’un tel shift reste la même sinon pire encore. Parce que d’un côté les aliénés sont logiquement frustrés de la nécessaire requalification de leur condition, séparés de la claire désignation de leur état de souffrance, privés du discours exact de leur aliénation, rendus incapables d’objectiver le nouveau mal qui les frappe, de lui donner un nom, placés dans le vide nominatif, privés de parole et de référence, alors que de l’autre les mêmes causes produisent les mêmes effets : de souffrance, de misère, d’apartheid, de guerres fratricides, meurtrières et imbéciles, d’abandon, d’injustice, de famine, de pillage de ressources, de perte de soi. Bref, le monde du 21ème siècle qui hérite de l’achèvement non entamé de cette violence symbolique pourra battre le record, toutes catégories confondues, de l’insoutenable indignité d’une humanité lacustre toute construite sur les pilotis douteux d’un énorme consensus frauduleux, qui a nom : DEMOCRATIE, LIBERALISME, MONDIALISATION, ECONOMIE DE MARCHE de dupe.
10. – Le rêve est la récompense de la frustration.
11. – Le sage rira-t-il des siècles qui, à ses yeux, apportent peu de choses mais en emportent beaucoup ? L’avenir appartiendra-t-il à ceux qui n’ont jamais évolué ? Un jour, le dernier des pygmées dira-t-il : « Ils sont venus, ils étaient si évolués, si turbulents et si pressés qu’ils sont partis sans attendre leur reste » ? Mais partis où ? Peut-être dans les étoiles, qui sait ?
12. – Si le génocide des juifs peut être comparé à une folie, folie meurtrière localisée dans le temps et l’espace, folie mettant en oeuvre la destruction d’une « race », on ne peut pas en dire autant de l’esclavage des Noirs. L’esclavage n’est pas une folie. L’esclavage c’est la froide assurance de l’être face à son contraire élu. L’esclavage n’est pas la haine, c’est la certitude tranquillement délirante et manichéenne qu’une certaine altérité raciale confinait au travestissement de l’espèce. Si le génocide des juifs est la solution finale d’une élection, l’esclavage des Noirs est l’élection d’une solution finale : le Noir comme solution finale du Blanc, l’Afrique noire comme solution finale de l’Europe judéo-chrétienne (le melon est une élection finale à l’apéritif familial) Oui, l’esclavage des Noirs est une élection collective non démocratique de la figure raciale emblématique de l’envers de l’« homme » dont l’appréhension naît de la peur des électeurs autoproclamés qui sous-tend l’idéologie de la prédation au principe de cette élection. Cette idéologie a été si fortement ancrée dans l’imaginaire qu’elle résiste aux siècles et défie toutes les bonnes volontés. Et, aussi longtemps que cette effroyable conception de la prédation ne prendra pas fin, aussi longtemps que les électeurs autoproclamés de cette mascarade électorale n’auront pas de façon claire renié leur intention politique, et économique, aussi longtemps que les prédateurs n’auront pas rendu leur tablier de chasseurs à l’intérieur de la jungle humaine, aussi longtemps que les grands faiseurs de mythes de l’humanité n’auront pas rendu leurs armes, nul Nègre sensé ne doit s’aventurer à confondre la sérénité manichéenne de l’élection d’une solution finale que constitue l’esclavage des Noirs avec la folie meurtrière de la solution finale qu’est le génocide des juifs.
13.–DROITS DE L’HOMME : Savez-vous comment le balayeur malien de Paris les appellent ? « DRAP DE L’HOMME », drap sur lequel on endort la conscience de l’homme…
14. – L’homme est le seul animal qui chasse à l’intérieur de l’espèce. Tant que l’homme n’aura pas cessé d’être inclus dans sa propre chaîne alimentaire, alors, il continuera de courir le risque inexorable de sa perte, son extinction. Et le monde cessera de posséder en sa personne un être capable de le contempler comme il mérite
15. – Vient un moment où il faut réviser la qualité de l’insulte pour continuer à atteindre le cœur du même homme : sale nègre !
16. – Elle avait un cœur à géométrie variable…
17. – Aujourd’hui, la plupart des singes sont plus heureux que les Nègres, et pourtant ceux qui nous rendent malheureux nous accusent d’être des singes.
18. – A bas le rêve soporifique du futur postérieur, vive le hic et nunc !
Binason Avèkes
© Copyright, Blaise Aplogan, 2006
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