Une contribution de Binason Avèkes
Dans un numéro daté du 30 juin de l’année dernière, un célèbre journal japonais s’est fait l’écho d’un fait qui au Pays du Soleil Levant ne dépareille pas les mœurs mais qui sous nos cieux tropicaux peut donner quelques sueurs froides à nos élus – surtout ceux de nos « honorables » qui bradent en ce moment leur honneur en des combats d’arrière-garde douteux, source d’arriération pour notre pays malgré le courage et l’intelligence active de ses nouveaux dirigeants– tous ces élus dont la joie de représenter le peuple est directement proportionnelle à la misère tenace de celui-ci. Mais parler de sueur froide ce serait sous-estimer la pachydermie constitutionnelle de certains de nos élus, bêtes à sang chaud qui brillent plutôt par leur pelage raide et leur manque de décence, harde perfide pour qui la politique est une matière première avant d’être une première matière.
Mais trêve d' éthologie politique, voici la nouvelle que révélait le célèbre journal japonais. A Kurayoshi, petite ville de la préfecture de Kyodo, le maire a décidé de se mettre dorénavant à laver lui-même les toilettes publiques du Centre Urbain et du Centre culturel, et ce en équipe avec les employés municipaux mobilisés pour la noble cause.
Raison de ce nettoyage ? Elle ne se trouve pas dans ce sens écologique naturel des Japonais qui a poussé naguère quelques villes à semer un peu partout au coin des rues et des bois l’équivalent de nos Tolègba pour servir d’instance sacrée de mise en garde aux pollueurs. Initiative originale s'il en est qui donne de bons résultats, du reste.
Non, la raison qui a poussé Monsieur Minoru Hasegawa, premier officier municipal de Kurayoshi à proposer à ses employés de mettre la main au cambouis réside dans un désir éthique du maire de contribuer à combler le déficit financier de la ville de manière autonome.
Désormais, le maire et 370 employés municipaux vont prendre en main au sens propre comme au sens figuré le nettoyage des lieux concernés trois jours par semaine. Les deux autres jours étant confiés à la société de nettoyage. Cette décision permettra d’économiser la bagatelle de 4 millions de yen, affirme le responsable du budget de la mairie.
Selon le même responsable, cette année fiscale, la ville a prélevé 650 millions de yen de ses réserves et l’année prochaine, hormis les fonds destinés à la retraite des employés, ces réserves seront au bord de l’épuisement.
Avec toutes ces explications, on comprend le sens de la décision salutaire du maire de mettre la main au cambouis. Une décision respectable mais dans le fond, est-elle si héroïque que cela ? Dans un pays où se faire hara-kiri est culturel, il est heureux de constater que la ville de Kurayoshi ait choisi de vivre. La particularité de ce choix c’est l’esprit d’autonomie. Et cet esprit est fort louable, très respectable. Plus respectable encore est l’exemple d’humilité que donne le maire en payant de sa personne.
Voici les bases éthiques sur lesquelles un pays comme le Japon s’est construit et est devenu une grande puissance respectable ; et voici les bases inverses sur lesquelles, entre irresponsabilité, prévarication, concussion, détournement, enrichissement illicites et pillage des ressources, nos représentants d’une époque pourtant révolue, ont creusé la tombe du pays... Le drame c’est que sans vergogne, ces faussoyeurs de la Nation osent opposer des intrigues d’arrière-garde au vent divin du changement qui souffle sur le pays et qui annonce son heureuse résurrection. Ces intrigants considérables, contre vents et marées entendent protéger leurs basses œuvres. Résister et renaître tel est leur credo, tactique cynique, qu’ils osent mettre en œuvre sous les dehors d’un légalisme dilatoire et spécieux. Ayant échoué à se faire passer pour les auteurs du changement, ils n’hésitent pas à jeter le masque et à montrer leur vrai visage de fauteurs de menace. L’impunité est leur paradis et ils ne se font pas à l’idée de le perdre. Quel cauchemar ! Ceux qui ont violé mille fois le droit et les lois de la vie économique et politique du pays, deviennent tout à sourcilleux des lois, pour une fois que leur impunité est menacée : ils font du respect des règles leur cheval de bataille : cynisme et culot monstre !
Quand on pense à tout cela, quand on voit le peuple plongé dans le noir en ce siècle de lueur et de progrès, on a envie de crier sus au faisceau cynique de nos élus, maffieux impénitents qui s’accrochent à leurs intérêts mesquins : Honorables cyniques, vous avez du culot ! Combattants d’arrière-garde ! Ô Zélateurs infâmes de l’impunité vous ne valez pas un pet ! Tous aux chiottes !
© Binason Avèkes, 2006.
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