Un continent comme l'Afrique illustre à la perfection et à la limite de la caricature le rêve transactionnel du capitalisme mondial : exploiter, piller, et prospérer en toute tranquillité. Un pays comme l'Afrique qui ne fabrique rien, et à qui on impose d’importer tout et de consommer des produits fabriqués ailleurs. Cette insertion aliénante de l'Afrique dans le système consumériste ne concerne pas seulement les produits de consommation courante requérant un certain niveau d'organisation industrielle pour leur fabrication, comme par exemple les voitures, l'électroménager, les outils informatiques, les moteurs, etc. mais elle pousse le vice à cultiver des besoins artificiels de produits dérisoires dont la possibilité de fabrication locale, par un détour absurde, est inversement proportionnelle à leur usage superficiel. C'est à ce prix d'aliénation technologique que l'Afrique participe à la prospérité du système capitaliste mondial avec le mot d'ordre : « ne fabriquez surtout rien, parce que vous n'êtes pas de la race supérieure des fabricants, mais consommez tout car vous êtes égaux dans la bestialité consumériste. » En somme, l'Afrique est prise en tenaille dans le double jeu du racisme. D'un côté elle est trop inférieure pour être comptée au nombre de la race des grands fabricants mais de l'autre, elle est trop utile pour qu’on ne l'égalise pas dans le consumérisme bestial du capitalisme. À condition bien sûr d'en payer le prix. Hier, le prix était l'homme africain lui-même, bête de somme idéale d'un capitalisme préindustriel, vendu et traité comme esclave pendant des siècles. Aujourd'hui, l'homme africain aurait acquis--par le triomphe de l'idéal abolitionniste, ou le réalisme de la machine ?--Un statut d'humanité qui l’égalise miraculeusement aux autres, à ses marchands et maîtres d'hier, et par là-même l’exempte de l'antique statut réifiant de l'esclavage. En revanche, c'est à son sol, ses richesses, ses matières premières, son pétrole, son diamant, son uranium, son or et ses minéraux plus ou moins rares de prendre le relais des corps d’hier comme produits d'échange du système capitaliste mondial. Toutes richesses qui sont accaparées dans la violence, la cupidité inhérente au capitalisme, la spoliation, le désordre savamment organisé, sans qu'il soit jamais donné droit à l’avis des Africains eux-mêmes. Si la machine a sauvé l'esclave d'hier et l’a libéré du ravalement au niveau des choses, qui sauvera les choses et l’Afrique de la spoliation, du pillage qu'impose le capitalisme à l'Afrique ?
Aminou Balogun
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