Il en est de même du cas de l’ex-député, Dovonou, dont les parents et amis, ces jours-ci à Zogbodomey, manifestent pour sa libération. Et à juste titre ! Voilà plus de deux ans qu'au motif de son implication dans une affaire d'escroquerie, ce monsieur va de mandat de dépôt en mandat de dépôt, alors que la loi fixe à trois le nombre de tels mandats susceptibles d'être imposés à un suspect, et que la durée de chacun d'eux ne devrait excéder six mois ; ce qui fait un maximum de 18 mois. Or l'ex-député qui n'est pas accusé de crimes de sang, comme Gbadamassi ni de viol est maintenu en prison depuis deux ans sans aucune justification.
Pourquoi le régime de ce pays fait si peu de cas du respect de la loi ? Pourquoi le peuple de ce pays ne fait pas sien le combat pour le respect du droit et de la liberté des individus ? Pourquoi s'habitue-t-on à l'arbitraire et compose-t-on si facilement avec lui ? Pourquoi acceptons-nous que la volonté d'un seul homme se substitue à la loi ? Pourquoi acceptons nous, vivons-nous facilement la confusion entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif ? Pourquoi c'est un seul homme qui doit décider de qui ira en prison, qui y restera ou qui en sortira, alors que nous disons que nous sommes un État de droit ? Comme le montre le combat historique des syndicats depuis plusieurs mois, combat qui en impose à une classe politique prostituée et lamentablement effacée, les excès de l'autocrate sont directement proportionnels à nos lâchetés, à nos silences, à nos compromissions, à nos peurs et à nos coupables complicités. Le grand drame du Bénin, au moment où, après la sombre période de Kérékou, il devait repartir sur des bases politiquement et moralement rénovées, le drame du Bénin disons-nous c'est de se voir aux prises avec ce président qui semble sorti tout droit de l'antre du diable, et dont toute la personnalité, l'éthique, et les dispositions jurent avec ce qui est bon pour notre pays et l’Afrique. Un président qui vient au pouvoir démocratiquement et qui foule aux pieds la constitution, instrumentalise les institutions et se substitue à la loi, eh bien un tel président n'est rien moins qu'une calamité morale, historique et politique. Le Bénin est pris dans le gouffre psychologique d'un individu imbu de soi, et qui en a une si haute idée qu'il se substitue à la loi. Et le peuple résigné le laisse faire. La classe politique stipendiée le laisse faire. les personnalités morales ou traditionnelles apprivoisées le laissent faire… Est-ce que c’est parce que nous ne nous aimons pas au Bénin que nous laissons nos semblables souffrir l’arbitraire sans rien dire ?
Le Bénin est pris dans ce drame du pouvoir lorsqu'au nom de l'autorité nécessaire celui qui doit conduire ses destinées selon la loi se prend lui-même pour cette loi. Le Bénin est pris dans le drame d’un dictateur suranné qui inflige son diktat dans le silence du peuple, dans la passivité d'un espace politique dévasté par la corruption, les intérêts personnels, les fantasmes de dynastie, les situations de rente, la prostitution, la collusion objective des soi-disant personnalités morales ou traditionnelles convertis en commensaux du pouvoir. Le drame du Bénin c'est d'être tombé sur un homme comme Yayi Boni au moment où il avait besoin d’un souffle de progrès, de vérité, d'abnégation et d'humanité pour donner la mesure de toutes ses virtualités ; rattraper son retard et montrer à l'Afrique et au monde qu'elle a une histoire et une originalité à prouver. Et le drame de Yayi Boni c'est son rapport psychologique à la loi. C'est de considérer que c'est dégradant pour lui de respecter la loi. C'est pour cela que de hold-up électoral en instrumentalisation des institutions de la république, d'apprivoisement tarifé des personnalités morales ou traditionnelles en achat de conscience tous azimuts, Yayi Boni ne reconnaît qu'une seule loi : celle de sa volonté qu'il place au-dessus du peuple.
Lorsqu'un Chef de l’Etat considère que respecter l’Etat de droit c'est perdre la face alors c'est toute la démocratie qui a perdu la face.
Adenifuja Bolaji
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