Contrairement à la France dont les média feignent d’ignorer la tension politique croissante au Bénin depuis plusieurs mois— et ce en dépit sinon à cause de sa place de puissance occidentale tutélaire—le pays d’Obama— et l’engagement clair de celui-ci pour la démocratie n’y est pas étranger —montre un vif intérêt pour tout ce qui se passe en Afrique, même dans un pays à la fois petit et culturellement éloigné comme le Bénin. Il y a quelques semaines, le député démocrate de la Chambre des représentants Alan Grayson, dans une lettre au secrétaire d’Etat américain pointait du doigt les dérives antidémocratiques en cours au Bénin. En conséquence de quoi, le député demandait à l’administration de réexaminer l’aide publique américaine au Bénin. Le député américain excipait de l’évolution du pays en matière de respect des libertés publiques et de la rationalité légale ; notamment, au regard de la poursuite de la détention des mis en cause dans l’affaire d’empoisonnement du président Yayi Boni, en dépit de deux décisions de justice ordonnant leur relaxe.
Il faut croire que depuis lors, les milieux politiques américains ne sont pas restés les bras croisés, et que le dossier béninois gagne du terrain et de l’intérêt. La preuve en est donnée par l’intérêt croissant des média américains à ce qui se passe dans notre pays sous l’angle précis du respect des libertés démocratiques et des droits de l’homme. Trois articles parmi d’autres illustrent cet intérêt du pays d’Obama à la vie politique du Bénin, là où on en France tous les média, à commencer par ceux qui prétendent s’intéresser aux affaire du Monde, jouent les autruches néocoloniales…
1. Le premier de ces articles émane d’un organe d’importance non négligeable, il s’agit de la VOA. (VOICE OF AFRICA) Intitulé : Benin's Red Wednesday Movement Adds to Political Uncertainty, l’article décrit bien la tension politique croissante du Bénin et met à nu ses enjeux et dessous sordides.
Bénin : Le Mouvement du Mercredi Rouge Accentue l’Incertitude Politique
Robbie Corey - Un mouvement de protestation naissant a ajouté aux préoccupations sur l'instabilité dans le petit pays ouest-africain du Bénin, où les autorités disent que le président a été la cible de deux tentatives de coup d'Etat séparés l'année dernière. Le mouvement du Mercredi Rouge ( Red Wednesday) s'engage à empêcher le président Thomas Boni Yayi de briguer un troisième mandat. Depuis environ un mois, des centaines d'habitants de la capitale du Bénin, Cotonou, s’habillent en vêtements de couleur rouge vif, tous les mercredis pour envoyer un message de paix, mais aussi l’expression claire de leur mécontentement vis-à-vis du gouvernement. Les organisateurs du mouvement du Mercredi Rouge disent qu'ils ont été rejoints par de nombreux citoyens d'autres villes à travers le pays. Les manifestants sont en colère à propos de ce qu'ils perçoivent comme une tentative par le président Yayi de briguer un troisième mandat. M. Yayi est devenu président en 2006 et s’est fait réélire en 2011 [dans des conditions pour le moins controversées.] Son mandat actuel expire en 2016, et les limites de durée imposées par la constitution l’empêchent de se représenter aux élections. Monsieur Yayi a essayé d'obtenir que le parlement examine la question de la réforme constitutionnelle. Il n'a fait aucune annonce explicite à propos de la modification de la durée du mandat, mais les organisateurs du Mercredi rouge comme Dieudonné Lokosu croient que c'est la raison de son intérêt pour le projet. [via le prétexte en or de l’avènement d’une nouvelle république] « Le mouvement du " Mercredi Rouge " n'est pas satisfait de la manière dont la démocratie est mise en œuvre au Bénin. Nous avons donc décidé de porter du rouge pour montrer notre déception », a déclaré Lokosu. Les membres du Mercredi Rouge disent qu'ils en ont assez de ce qu'ils décrivent comme un manque d’ambition au Bénin, dont l'économie est dominée par la production de coton. Mais il y a aussi au moins quelques liens entre le mouvement de protestation et les tensions politiques récentes, qui ont été mises en lumière en octobre dernier lorsque les autorités ont annoncé que trois personnes proches du président, y compris sa nièce et son médecin, avaient comploté pour l'empoisonner. Les autorités judiciaires ont déclaré que le complot a été organisé par Patrice Talon, un riche acteur de l'industrie du coton et un ancien allié du président Yayi. Monsieur Talon est actuellement en France. Dans des interviews données là-bas à la presse, il a dit qu'il avait aidé à financer les campagnes électorales de Yayi mais est tombé en désaccord avec le président sur son ambition de briguer un nouveau mandat en 2016. Monsieur Yayi, quant à lui, dit que l’homme d’affaire Talon voulait utiliser des contrats publics lucratifs pour développer sa fortune, et s'est fâché lorsque ces contrats ont été annulés. En plus de la tentative d'empoisonnement, les autorités béninoises ont déclaré en mars qu'elles avaient déjoué une deuxième tentative de coup d'Etat impliquant un associé de Talon. Un avocat de Monsieur Talon, Me Joseph JOGBENU, joue un rôle clé dans l'organisation des manifestations du Mercredi Rouge. Pendant ce temps, Talon semble être au moins temporairement protégé en France, qui a demandé plus d'informations avant d'envisager de répondre à une demande de l'extrader au Bénin. Lydie Boka, directeur de la firme Strategico d'analyse des risques, a déclaré qu'il est probable que Talon soit en mesure de créer plus de maux de tête au président s'il le voulait. « Le fait est que Talon est un gars qui déteste Yayi. C'est réciproque, a-t-elle dit. Et la France permet à Talon d'être ici, et dit plus ou moins à Yayi, " Laissez-le tranquille" » L'animosité entre les deux hommes a peut-être influencé la décision du Président Yayi de limoger son gouvernement la semaine dernière, a dit Mme Boka. Dans le nouveau gouvernement annoncé cette semaine, plusieurs partisans importants de Talon ont été limogés, tandis que les Ministres qui se sont fait entendre dans leur soutien à Yayi sont restés.
|
2. Un deuxième article publié par l’Associated Press brosse le même tableau politique du Bénin placé sous le signe de la tension et de l’opposition croissante à laquelle fait face le pouvoir en place
COTONOU, Benin (AP) — Benin President Thomas Boni Yayi already has accused the country's richest man of plotting with the leader's niece and personal physician to poison him. Now he's sacked his entire government as he faces a growing protest movement accusing him of seeking to remove term limits set by the constitution.
In this tiny West African country, pressure is mounting and analysts say the sense of uncertainty is deepening as protesters enter their second month of holding weekly demonstrations. The tensions risk undermining Benin's reputation as a stable democracy in a tumultuous corner of the world.
Just last month, U.S. Secretary of State John Kerry praised the country as "a democratic leader in West Africa." In March, officials here announced they had thwarted a second coup attempt.
…. (read more)
|
3. La même Associated Press rend compte de la formation du nouveau gouvernement au Bénin consécutive à la dissolution dramatique [anticonstitutionnelle et inédite] opérée par le Président Yayi, et que le journal qualifie de shake-up
Benin gets new government after surprise shake-up
COTONOU, Benin (AP) - The president of the tiny West African nation of Benin has named a new Cabinet, three days after he dissolved his entire government in a surprise move.
A statement read on state television Sunday night detailed the 26-member team composed of 13 new members and 13 officials who served in the old government of Prime Minister Pascal Irene Koukpaki.
The posts of prime minister and minister for presidential affairs have been eliminated, according to the statement. Other notable departures include the ministers of justice and the interior, who were both replaced….
|
Que dire de cet intérêt manifeste du pays d’Obama pour notre pays ? Eh bien, c’est un signe réconfortant du fait que les choses ne se passeront pas à la sauvette en dépit du nombrilisme autoritaire et irrationnel avec lequel procède Yayi Boni. Si Yayi Boni s’entête dans son non respect des libertés, c’est le pays tout entier qui en pâtirait en termes d’aide et d’investissement alors que la filière coton s’essouffle du fait de l’acharnement sur ses acteurs principaux, et de l’inefficacité des mesures gouvernementales de substitution. La France dont nous parlons officiellement la langue, et à laquelle dans un réflexe infantile Yayi Boni a fait appel pour lui extrader Talon fait semblant d’ignorer ce qui se passe dans cette ancienne colonie qu’elle continue de manipuler, comme l’atteste le rôle sordide et révoltant qu’y a joué ses représentants dans le holdup de mars 2011. Mais le comportement néocolonialiste de la France ne découragera pas le peuple du Bénin, décidé à conquérir sa liberté réelle et totale. L’intérêt américain pour notre pays, comme la conspiration du silence qui prévaut en France s’équilibrent. Au-delà de cet équilibre, il appartient au Peuple Béninois d’assumer son destin Binason Avèkes |
|
|
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.