Depuis quelque temps, le pouvoir en place au Bénin sous la gouvernance loufoque de M. Yayi crie au complot. Ce cri d'orfraie qui a atteint son paroxysme le 1er août dernier avec les propos scandaleux de la bouche d’un président de la république a ciblé quelques boucs émissaires parmi les opérateurs économiques. Et les réactions indignées qu'il a suscitées dans la classe politique ont été en un mouvement circulaire pour le moins vicieux mises au compte des preuves du complot en question. Que croient M. Yayi et les siens ? Que la démocratie est un régime où ne doit régner qu'une seule opinion ? Quelle est cette conception de la vie publique qui fait du moindre critique de l'action des gouvernants un casus belli. À entendre le chef de l'État, le pays va bien, du moins son action à lui est irréprochable, et tout ce qui va mal est à mettre au compte soit de la crise ou soit des acteurs malintentionnés de l'opposition. Et cette conception simpliste pour le moins manichéenne de la réalité sociopolitique ne doit souffrir la moindre réserve, la moins critique. S'inquiéter du réel, le faire savoir haut et fort c'est comploter contre le gouvernement. |
Les Béninois ne sont pas des imbéciles. Ils ont subi le hold-up, et comme une femme violée, ils se sont tus de honte. Eux qui passaient pour modèle africain de la nouvelle génération post-La Baule de la démocratie. Ils ne voulaient pas que le monde entier tourne son regard sur le ridicule de leur situation ; tomber d'aussi haut est pour eux une posture dont ils ne sont pas fiers. De plus, ils voulaient une belle excuse pour oublier le hold-up, comme une femme violée rêve d'avoir l'enfant qu'elle n'a jamais eu. Et si le président banquier faisait un miracle ? Et si, loin d'entretenir la bauge infecte et corrompue de ses amis et parents, il daignait jeter le filet sur le fleuve étale de la nation tout entière ? Et si ce filet revenait rempli de victuailles et de quoi nourrir tout le monde ? Alors on pourrait cacher la honte du hold-up, la honte du viol, la honte du coup de couteau au coeur de la démocratie derrière la joie de la prospérité partagée. Mais voilà qu'il n'en est rien ; qu'il n'y a ni joie ni prospérité et le peuple affamé n'entend plus cacher sa honte. Il gronde en son sein d'une révolte légitime et trop longtemps contenue. La blessure au coeur de sa démocratie lui fait mal. Et il a bien l'intention de le faire savoir au monde urbi et orbi. C'est ça que le pouvoir, montant sur ces chevaux de bois d'une démocratie usurpée, appelle complot. Est-ce raisonnable qu’un pouvoir que tout le monde sait usurpé se permettre de jouer les gardiens du temple de la légitimité démocratique ? Ce n'est pas parce qu'on est en politique qu'il faut prendre ses vessies pour des lanternes, ses propres mythes pour une référence absolue. À un moment donné même le besoin de lutter contre l'adversaire doit faire la part de la vérité et de la sincérité. On ne peut pas continuer à se mentir à soi parce qu'on peut mentir aux autres. Ce que M. Yayi ne sait pas c'est que les Béninois sont un peuple à sang-froid mais ils sont loin d'être amnésiques. Aminou Balogun |
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