Pourquoi l'Afrique n'a jamais de crise, comme les occidentaux en ont et qui scandent leur histoire économique et sociale de façon récurrente ? Parce que l'Afrique n'a pas la culture de prévision. Elle ne fait pas de la prévision une valeur. La crise est l'expression de l'écart de la réalité par rapport aux prévisions. Suprrimez la culture de prévision, il n'y aura plus de crise. Prenez l'Europe et un pays comme l'Espagne dont on nous rebat les oreilles de la crise économique. Qu'est-ce que ce pays, il n'y a pas si longtemps encore décadent, dont l'économie il y a 40 ans n'était pas plus prospère que celle de ses voisins méditerranéens du sud notamment du côté africain, qu'est-ce que ce pays a fait pour se voir bombardé pays européen de culture consumériste et intégré au système économique européen ? Rien sinon qu'il est effectivement un pays occidental de culture chrétienne, et qu'à ce titre il a été idéologiquement décrété qu'il devait faire partie de la horde primitive des jouisseurs et des dépositaires du fantasme de la coprospérité européenne. Mais une économie consistante va au-delà des fantasmes et des décrets idéologiques ; passée la période illusoire, la réalité de fond se rappelle au souvenir de la myopie idéologique. Sur quelle valeur ou ressource est adossée la prospérité putative de l'Espagne ? Contrairement à des pays comme la Corée ou la Suisse, on a du mal à répondre à cette question simple. Il n'aura pas suffi de prévoir que, en tant que pays du groupe européen, l'Espagne ou la Grèce, ou je ne sais quel pays aura une croissance estimée à tant, un taux d'endettement estimé à tant, un chômage estimé à tant, un commerce extérieur estimé à tant, etc...
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Lorsque ces éléments de prévision qui ont été soutenus longtemps dans la fiction montrent leur écart avec la réalité, alors on parle de crise. C'est dire que la crise est un concept éminemment ethnocentriste basé sur l'idée implicite que les Blancs, les Occidentaux, ceux qui dominent le monde depuis plusieurs siècles à coups d'esclavage de l'Afrique, de domination et du pillage de ses ressources, bref les Blancs sont faits pour jouir, progresser, exploiter, dominer. Quand l'un quelconque de ces termes vient à faillir, ils parlent de crise. Comparés à eux, les Africains qui subissent leur exploitation depuis des siècles seraient donc en crise permanente ; la crise en Afrique serait comme une donnée naturelle, inhérente, consubstantielle au destin qui lui est fait. Tout cela montre clairement les préssupossés subtils de l'économisme, et ses vraies nature et fonction : la rationalisation d'une piraterie naturalisée...
Éloi Goutchili
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