Peut-être parce que les hommes politiques ont le sentiment sinon la certitude qu’ils ne sont pas en réalité élus par le peuple, mais plutôt : soit à un niveau interne et inférieur par un système occulte fait de manipulation, d’achat de vote, de corruption, de trucage, avec en toile de fond le conditionnement des réflexes régionalistes ; soit à un niveau externe et supérieur, par les Blancs, les néo-colonisateurs, “nos partenaires économiques”, les milieux d’affaire et d’intérêt qui ont toujours saigné nos pays depuis des siècles et qui n’entendent pas lâcher le morceau, les acteurs de la géopolitique qu’ils soient françafricains ou africains. Dans ce cas, et à un niveau ou à un autre c’est pour ces gens-là que les hommes politiques roulent, c’est entre ces gens-là et eux mêmes qu’ils se partagent les retombées du pouvoir. Et c’est la satisfaction des besoins de ces systèmes seule qui donne sens à l’action en apparence incohérente et stérile de nos dirigeants pour peu qu’on les mesure naïvement à l’aune du désir et de l’espérance du citoyen ordinaire.
Ainsi si on considère Yayi Boni au Bénin, on a le sentiment d’un véritable fiasco, d’une action globalement insensée et stérile si l’on se place au niveau de ce peuple de 2006 dont on suppose qu’il a été à l’origine des 75% qui ont voté pour lui. Mais l’absurdité de son bilan et de son action, la misère, la frustration indéniable dans laquelle il laisse le peuple ne se comprennent que si, à la manière de Kant et sa révolution copernicienne en épistémologie, on change le référentiel de l’évaluation de ses actions. Alors on se dit qu’il doit y avoir un système de classes et de gens par rapport aux intérêts desquels toute l’action de Yayi Boni prend sens : car dans bien des cas, la plupart des choses que nos trouvons absurdes ne sont telles qu’en apparence !
Dr Batoko Alassane
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