de Littérature Béninois
Fini le temps béni et Ô combien merveilleux des Jean Pliya, des Olympe Bhêly-Quenum, et des Agbossahessou ! Au Bénin, la littérature est devenue l’ombre d’elle-même. Après avoir traversé une longue nuit de léthargie, et fait les frais d’une funeste agonie de la raison esthétique et intellectuelle, la voilà qui choisit son option de renaissance. Elle sera politique ou ne sera pas. Et quand on dit politique, n’allez surtout pas entendre ce mot au sens où les Grecs le définissaient au plus fort de leur passion pour la raison. Non, la politique dont il s’agit ici est celle des laveurs de chèques, des passionnés des Fonds d’escorte, celles des forçats du cauris émergent, des acheteurs et des achetés de consciences en tout genre. La politique qui vole bas, en somme.
Cette nouvelle littérature, qui raie d’un trait de plume ce que dans tous les pays normaux du monde on appelle littérature, a ses représentants attitrés, que sont les Reckya Madougou, les Bruno Amoussou, les Dr Fassassi Yacouba, etc.. Chacun de ces poids lourds de la nouvelle école de littérature béninoise essayant à qui mieux mieux de se hisser vers les cimes prestigieuses de la gloire internationale, qui pour eux ont nom : Paris, New York, le Capitole, la Maison Blanche, Afrique du Sud ! Il faut que le monde entier goûte aux derniers crus de la nouvelle littérature béninoise, et savoure sa honteuse médiocrité esthétique et monoculturale. Tissus de billevesées sans vision, sans concepts, ressassement de banalités puériles, voilà le nec plus ultra de la nouvelle littérature au Bénin. Et comme il s’agit d’une exportation des passions politiques sur le terrain littéraire, pour autant qu’elle fût jamais honorée par les borborygmes insipides de nos bas-bleus politiques, la littérature, devient le champ clos de luttes stériles qui n’ont rien à voir avec elle. Dès lors se font jour deux camps littéraires tranchés : il y les écrivains du Pouvoir et les écrivains de l’opposition. Aux positionnements ce ceux-ci, dont la frustration inhérente à la traversée du désert politique, on le comprend, a pu aiguiser la plume et affiner les capacités d’analyse, le pouvoir oppose sans états d’âme les gesticulations grimaçantes de ses petits soldats de la plume. La diplomatie nationale est à cet effet réquisitionnée. Ainsi au moment où Bruno Amoussou après avoir lancé son ouvrage, « l’Afrique est mon Combat » à Paris, s’apprête à en faire la promotion au Bénin – curieuse inversion dont la démarche à elle seule en dit long sur le parti pris aliéné de cette nouvelle littérature – un Docteur, – oui, un de ceux-là qui, à l’instar de notre Président, ne se gênent pas de porter le titre, même s’ils ne soignent rien – enfourchant son vaisseau futuriste s’en va par monts et par vaux, prêcher la bonne nouvelle littéraire avec son « En route vers le Futur » Tissus de banalités, affublé d’un titre dont la résonance Star-Trek, pense-t-on dans le cercle des manipulateurs du Pouvoir, a de quoi fasciner les Anglo-Saxons, et faire fortune au pays de l’Oncle Sam. Mais imagine-t-on un seul instant que toutes ces pauses photos quémandées ici et là, ces dédicaces pompeuses et ces rendez-vous diplomatiques au sommet autour d’un ouvrage dont la seule originalité est son manque d’originalité pouvaient se faire sans la médiation servile de notre diplomatie ? Oh, que non ! Mais, après tout, pourquoi pas ? Le Pouvoir a le droit d’appuyer ses nouveaux héros littéraires. Bientôt le vaisseau futuriste du Dr Yacouba, héraut littéraire du Dr Yayi Boni, sera dans le ciel de la Suède, aux Portes de l’Académie Nobel ! C’est là une façon dynamique d’assumer le Changement de paradigme dans le champ littéraire béninois. Mais le plus curieux, c’est que le fameux Docteur n’ait pas cherché à faire traduire son ouvrage en anglais. Comment espère-t-il alors que ses hôtes Anglo-saxons puissent le lire et en savourer le contenu, si tout cela n’est pas que dérisoire gesticulation ? Et pourquoi, comble du paradoxe, est-il si peu pressé d’aller exposer aux lueurs parisiennes son chef-d’œuvre littéraire écrit dans la langue de Molière ?
Comme un fleuve souillé, la politique passe, et la littérature reste. Mais de quoi se nourrira l’imaginaire de nos enfants ? De la Politique qui ne nourrit que les Voleurs et Laveurs de chèque ? Ô Aziza ! Ô Muses ! Dieux et Déesses tutélaires de la littérature, sauvez-nous! De la médiocrité venimeuse du Changement qui corrompt la littérature !
Aminou Balogoun
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