Pourquoi peut-on se Demander si l'Africain est Encore Homo Faber ?
L’avenir de notre race est compromis par son réalisme à courte vue, son manque d’exigence et d’ambition dans un monde qui la berce de ses offres. Dans le monde actuel hautement technologique, il va de soi que l’Africain, en tant que nation ou continent ne contribue en rien ou presque : nous ne fabriquons pas de voiture, pas d’avion, pas d’ordinateur, pas de téléphones, etc… Mais tout Africain, dès lors qu’il en a l’argent s’en donne à cœur joie d’avoir ces choses : voitures, téléviseurs, téléphones, ordinateurs, etc… Il a le sentiment que d’autres sont là pour les fabriquer pour lui. Et ne se rend pas compte qu’il suffit qu’une loi internationale décrète que chaque continent doit fabriquer ce qu’il consomme pour qu’il soit en rade. Lui, sa vocation est d’acheter ce que les autres fabriquent, et cela ne le gène pas. C’est la même chose aussi pour les soins de santé. Quand les gens sont malades, notamment les nantis, c’est-à-dire l’élite politico-économique, on les “évacue” comme on dit dans les beaux hôpitaux occidentaux ; c’est ainsi que par exemple l’épouse de l’ex-chef d’Etat nigérian, Obasanjo, est décédée dans un hôpital d’Espagne loin de sa terre natale, et aujourd'hui, Dadis Camara, le dictateur guinéen au petit pied qui sait jouer des armes et des balles au point d’en avoir reçu quelques-unes dans sa tête de linotte n’est pourtant pas fichu de se faire soigner dans son propre pays et doit être évacué au Maroc ! Et si tout le monde faisait comme les Africains en évacuant ses malades chez les autres, bientôt on évacuera tout le monde sur une planète étrangère !
Dans un tel état d’esprit, avec une telle mentalité pourquoi les élites de nos pays chercheront-elles à construire et entretenir des hôpitaux dignes de ce nom ? La chose en est même ainsi sur le plan symbolique. D’ailleurs c’est de là que vient le malheur. Nos ancêtres nous ont légué des religions et des langues si riches, si belles, et mieux à même de nourrir nos esprits, et de traduire nos pensées. Et pourtant nul ne trouve aberrante notre extraversion dans ce domaine. Nul ne trouve farfelu que nous n’utilisions nos langues de façon active, n’apprenions à nos enfants à les écrire et à les parler. Nous nous contentons volontiers et paresseusement de laisser agir l’héritage empoisonné du colonialisme. Feignant de croire que les pièges et poisons contenus dans la langue de l’ancien et nouveau colonisateur blancs venu de si loin laisseront indemnes notre liberté de conscience et l’autonomie de notre regard sur le monde. Alors que nous sommes issus d’une culture qui valorise le pouvoir de la parole sur les choses, nous feignons de ne pas voir qu’en laissant libre cours à la parole de l’autre venu de si loin et qui n’a jamais brillé par ses bonnes intentions à notre égard, nous lui donnons pouvoir sur nous et nos choses.
Partout aujourd’hui cette fainéantise écervelée de l’Africain héritée du passé est reconduite dans le présent avec une étonnante alacrité par l’Africain lui-même qui tient pour naturelle la division du travail imposée dans le monde par les Blancs. Le résultat visible de cette concession débile et non questionnée est la réalisation des plans macabres et carnassiers de ceux qui n’entendent pas nous laisser jouir de nos biens au premier rang desquels se trouve notre liberté ; et qui s’en accaparent pour ne nous laisser que des miettes. Et le résultat le moins visible et sans doute le plus redoutable est que nous renonçons à notre propre autonomie et à notre aptitude d’homo faber. Ce faisant, nous régressons dans l’arbre de l’espèce humaine, justifiant de façon circulaire et a postériori le discours raciste de ceux qui nous dominent et nous exploitent. Car l’humanité n’est pas une identité scellée dans une essence irrévocable. A chaque instant, elle doit être défendue, illustrée et assumée. Faute de quoi, on court le risque d'en déchoir…
Bayo Adébayo
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