Mon Idéo Va, Court, Vole et Tombe sur…:
À Remplir
Quand vous évoquez sa région ou son pays, l’Africain n’est pas souvent enthousiasmé, l’air de vous dire « cause toujours, tu m’intéresses. » Mais lorsque vous lui parlez d’Afrique, il s’anime soudain, l’air de vous dire, à l’instar des nigérians « Now you are talking… ».
Mais quand vous creusez un peu, vous vous rendez-compte que cette Afrique dont il s’agit est une calebasse vide ou presque, souvent morcelée ; que par exemple pour le Béninois, elle se limite au Togo-Gabon-Niger-Burkina-Cameroun-Mali-Guinée-Sénégal-Côte-d’Ivoire-Tchad-RCA-Congo, etc. bref à la portion francophone ; et que le prochain africain du Togolais est plus le Gabonais que le Ghanéen, son frère direct !
Cette déprise du proche, du spécifique et de l’immédiat au profit d’une représentation générale, chaleureuse quoique lointaine de l’Afrique des mêmes et des semblables, une Afrique des frères et des cousins, est aussi celle qui sous-tend la réalité du continent où se déroule le plus de guerres civiles, de génocides, de coups d’états dans le monde.
D’où vient-il que le continent le plus mal organisé soit celui dont les ressortissants jurent plus facilement par sa référence au détriment de leur insertion nationale ou régionale ? Est-ce parce que l’Africain serait mal fagoté dans sa nation héritée du colonialisme ? Si oui, pourquoi substitue-t-il une représentation aliénée à une réalité aliénée ? Car, il va de soi que les termes « Afrique », « Africains » sont d’origine étrangère à usage des étrangers ; et que le fait d’y adhérer spontanément et passionnément traduit une auto-appréhension aliénée, ou à tout le moins l’appropriation non questionnée du regard d’autrui sur soi.
Car quoi, pourquoi l’Africain serait-il plus Africain que l’Européen n’est Européen alors que l’affirmation continentale de soi requiert plus d’organisation ? Que l’Africain se dise Africain lorsqu’il est en face de gens qui se disent Européens ou Américains peut se comprendre d’autant que l’histoire l’oblige à le dire dans leur langue. Mais qu’il continue à se dire Africain lorsqu’il est dans sa case, voilà qui est problématique ! Il n’y a aucune raison à cela en dehors de l’inconscience spontanée qui lui fait endosser le regard qu’autrui a sur lui. En somme, il s’agit de l’incapacité de concevoir un regard sur soi autonome et propre. Or cette incapacité ou son pendant, – la propension à se regarder à travers le prisme déformant de l’autre, et en l’occurrence du bourreau, du prédateur, de l’exploiteur, – est l’impédimenta mental dont l’Africain doit se défaire pour que la Calebasse Afrique se remplisse de sens et d'essence.
Éloi Goutchili
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