Le Point de vue Médiologique
Plus exactement, pourquoi un emprisonnement spectaculaire mis en scène à la veille même de Noel ? D’abord, signalons qu’avec Gnonlonfoun, Amègnissè, Fagbohoun, Adihou et consorts, Pierre Simon Adovèlandé n’est pas moins du 5ème homme politique du sud que Yayi Boni fait embastiller depuis son accession au pouvoir en 2006. Ses victimes carcérales ne sont jamais du Nord, mais toujours et régulièrement du Sud. Ce qui montre très bien qu’au-delà des raisons officielles et immédiates invoquées à chaque fois, les vraies raisons de ces embastillements régionalement déterminés sont politiques. Dans le cas de Pierre Simon Adovèlandé, ces raisons sont d’autant plus évidentes qu’elles sont ridicules. Pierre Simon Adovèlandé risque-t-il de voler la vedette à Yayi en 2011 en se présentant aux élections ? Ou constitue-t-il comme Bio Tchané un pôle technocratique de trop susceptible de réduire ses propres marges ? Tout cela est probable. Mais doit-on embastiller quelqu’un sur la base de critères aussi marginaux et hypothétiques ? Certainement pas.
Certes, le sans-gêne avec lequel Yayi Boni embastille un homme perçu comme ayant le soutien des Américains peut être une façon de caresser les pontes françafricains dans le sens du poil ; utiliser l’épouvantail-Amérique pour montrer à ces faiseurs de rois que l’attachement à la grande France, à ses intérêts et à sa sensibilité est une valeur que l’on tient en haute estime sous le régime du changement.
Mais d’un tout autre point de vue, au regard de la tournure médiatico-politique que prend maintenant la volonté de passage en force de Yayi Boni dans le dossier épineux de la Lépi, il n’est pas exclu que l’incarcération spectaculaire de Pierre Simon Adovèlandé puisse être une manière de provocation de l’opposition ; la mettre en émoi, et ce faisant lui donner une occupation : mobiliser ses militants et son attention – comme elle le fit d’ailleurs dans le cas infiniment moins grave du maire de Dangbo. Et le but de cette assignation d’occupation ? Eh bien détourner l’attention de l’opposition de la question capitale de la Lépi au moment où elle se poserait de façon décisive. Autrement dit, outre ses motivations politiques partielles évidentes, la raison de l’embastillement spectaculaire de Pierre Simon Adovèlandé une veille de Noel est d’ordre manipulatoire ; une opération de prestidigitation consistant à donner un os politico-médiatique à ronger à l’opposition et à ses militants de manière à découper à sa guise la grosse viande de la Lépi, au moment où elle viendrait à être posée sur le tapis.
Comme quoi, autour de la Lépi, plane un fumet de magie. La fraude sur la Lépi, par sa procédure de geste en deux mouvements, avait déjà un caractère magique. Cette façon d’utiliser l’incarcération d’un soi-disant adversaire typologique pour détourner l’attention politico-médiatique de l’opposition de la question de la Lépi au moment où l’essentiel de ses actes décisifs se dérouleront est d’inspiration proprement magique.
Heureusement que l’opposition, qui n’est pas née de la dernière pluie, n’est pas tombée dans le panneau. Peut-être que dans l'intérêt de l'objectivité démocratique, elle aurait dû y tomber un peu, ne serait-ce que l'effleurer : mais elle n’est pas estampillée “vieille classe politique” pour rien !
Batoko Alassane
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