Pourquoi le Roi du Dahomey était-il sincère lorsqu’il considérait que les sacrifices humains étaient un devoir sacré non-négociable et infrangible ?
Au Dahomey, les grandes fêtes des « coutumes », à l'occasion desquelles se perpétraient ces sacrifices humains, apparaissaient non pas comme un phénomène isolé, mais bien comme l'expression de la civilisation dahoméenne dans sa totalité : les témoins européens eux-mêmes reconnaissaient que leur suppression porterait un coup fatal aux institutions, aux rapports sociaux, au fondement même du royaume d'Abomey; ces fêtes, où l'on immolait chaque année quelques dizaines d'esclaves, voire quelques centaines à l'occasion des funérailles proprement dites du roi régnant, exprimaient d'abord un grand moment de la vie militaire du royaume, au retour de la campagne de razzia annuelle; elles étaient sacralisées par un rituel immuable et précis au travers duquel s'exprimait l'idéologie ambiante, c'est-à-dire à la fois les convictions religieuses et le système politique dahoméens, mais aussi les fondements économiques du royaume : les coutumes, en même temps qu'elles célébraient la transmission de la fonction royale, assuraient, par le caractère ostentatoire des cérémonies, celle des biens qui lui étaient attachés. Et le roi était sincère, lorsqu'il répondait aux envoyés occidentaux que les sacrifices étaient « un devoir tellement sacré que rien ne pourrait [le] décider à s'en dispenser, quand même on lui proposerait les plus grands bénéfices sur les esclaves qui y sont destinés » .
Source : Afrique Noire : Permanences et Ruptures, Catherine COQUERY-VIDROVITCH, L’Harmattan Paris, 1994
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